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Mardi 30 mars 2010 à 0:00

La justice privée pour les noms de domaine est-elle équitable ?

Internet n'est pas et n'a jamais été, comme on l'entend encore tropsouvent, une "zone de non droit". Au contraire, il y a toujours eu lesouci de mettre en place des règles et des procédures pour les fairerespecter, à commencer par l'architecture même du réseau. Mais il y atoujours eu aussi la tentation d'éviter les lourdeurs de la justicetraditionnelle, jugée trop coûteuse, trop lente et trop incapable desaisir les enjeux techniques à travers leurs décisions juridiques. Ils'est donc développé une sorte de justice privée parallèle, basée sur lanégociation et l'arbitrage, dont les noms de domaine  sont unparfait exemple.

Lorsqu'une entreprise (ou un particulier) souhaite dénoncer un nomde domaine  déposé en violation de ses droits, elle peut s'enremettre à la justice étatique, mais elle est incitée à utiliser laprocédure d'arbitrage uniforme baptisée UDRP, dont les règles ont étéfixées par l'ICANN et sont imposées depuis 1999 à tous les vendeurs de nomsde domaine   en .com, .net, .org, .info, .name, et .biz. S'il estavéré que le nom de domaine   attaqué a bien été déposé en violation d'une marquecommerciale, sans "intérêt légitime" à le posséder, ou "de mauvaisefoi", les arbitres saisis peuvent annuler l'octroi du nom de domaine, oule transférer au plaignant.

La première chose à faire pour le plaignant est de choisirl'organisme d'arbitrage. L'ICANN n'en reconnaît actuellement que quatre :un centre spécialisé qui dispose de plusieurs bureaux en Asie, la Courd'Arbitrage Tchèque (CAC), l'Organisation Mondiale de la PropriétéIntellectuelle (OMPI), et le Forum National d'Arbitrage (NAF). Tousfacturent leurs services aux demandeurs, sauf dans les rares cas où ledéfendeur souhaite bénéficier d'un collège de 3 arbitres, auquel cas lanote est partagée.

La concurrence entre les quatre organisations d'arbitrage se faitd'abord sur le prix, déjà beaucoup plus accessible qu'une procédurejudiciaire traditionnelle. Demander à un arbitre de l'OMPI de trancherun litige sur un nom de domaine   ne coûteainsi que 1500 dollars, dont 1000 dollars sont reversés à l'arbitre poursa rémunération, tandis qu'au NAF le même service coûte 1300 dollars(.pdf). La CAC ne facture que 500 euros l'arbitrage pour le nomde domaine , dont 250 euros vont à l'arbitre. Mais il n'estquasiment jamais choisi par les plaignants. Etrange ?

Malgré le prix le plus élevé, l'OMPI est choisi le plus souvent. Saréputation d'organisation internationale spécialisée en propriétéintellectuelle joue sans doute, s'agissant essentiellement de conflitsliés à des marques commerciales. Mais hasard ou coïncidences, l'OMPI estaussi l'organisme qui accède le plus souvent aux demandes desplaignants à l'encontre des noms de domaine  attaqués.Sur un peu plus de 16.900 plaintes examinées depuis 1999 au sein del'OMPI, moins de 1.900 ont été rejetées, et l'énorme majorité (88,8 %)ont au moins partiellement donné satisfaction au plaignant. Dans 63 %des cas, le domaine leur a été transféré.

Au NAF, qui est également beaucoup choisi, sur 12695 décisions prisesdepuis 1999 88 % donnent raison au demandeur. Or le coût nominal d'uneplainte étant négligeable et les enjeux commerciaux parfoisconsidérables, nombre d'entreprises préfèrent s'en remettre auxorganismes qui statistiquement leur donnent le plus de chance devictoires. Un peu comme si l'on pouvait choisir en France le tribunal oùporter plainte, pour avoir le plus de chance de tomber sur un jugeconciliant. Il y a heureusement des règles de compétence quil'interdisent dans la justice traditionnelle, mais pas pour l'UDRP.

Or il y a matière à s'interroger. Le NAF compte parmi ses rangs 141arbitres. Mais le cabinet d'avocats Muscovitch a calculé qu'une mêmearbitre était présente sur environ 10 % des litiges tranchés, et qu'elleétait aussi parmi les arbitres qui transféraient le plus souvent les nomsde domaine  à la demande des plaignants, avec un taux de transfertde 92,7 %.

Un tel constat ne peut, au minimum, que soulever des interrogationssur la capacité des "gouvernants" du web à créer une justice parallèleéquitable. Pour mettre fin aux doutes, il serait bon qu'au moins l'ICANNprécise dans sa procédure UDRP que les arbitres doivent être nommés auhasard, et non pas sur d'obscures critères internes que seules lesorganisations d'arbitrage décident, connaissent, contrôlent etappliquent. Et peut-être mettre fin, aussi, à la concurrence entrel'OMPI, le NAF et les quelques autres organismes.

Source: Numerama.com

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